12-13 avril 2014
La diagonale Nord du pic d'Espouy
Avec Laurent Lafforgue et Cyril Renailler
Comme je n'ai jamais mis les pieds plus loin que la peña de las Once dans ce massif du Cotiella, direction son deuxième sommet, le pic d'Espouy (ce nom n'apparaît plus sur les cartes Alpina actuelles, on lit en lieu et place : pico de las Bruixas (Brujas) o punta de Armeña, 2822m) avec Laurent et Cyril.
Après avoir rejoint la vallée de Plan et Saravillo, commencent les 13km de piste menant au collado del Ibon et au refuge de Lavassar. En cette mi-mai, la piste sortant à peine de l'hiver, après quelques exercices de découpe d'arbres et autre pelletages de congères, on laisse la voiture à 3km du refuge qu'on gagne en 1h ski aux pieds... puis sur le dos.
Ciel dégagé, il fait très bon et après la séance de bois, on peu profiter sereinement de la soirée en admirant le coucher de soleil pendant l'apéro et le repas...
Moules locales, foie gras, grattons de canard...
Séquence apéro...
Laurent teste les chaussures de ski pour l'escalade
Coucher de soleil sur le massif du Mont Perdu
Cette fois-ci, réveil matinal, on descend un peu en direction de l'ibon de Plan avant de chausser les skis pour rejoindre cette belle nappe d'eau encore bien gelée. Contournement par la rive droite...
Cyril au bout de l'ibon de Plan
Au fond du lac, commence la montée pour franchir le verrou donnant accès au vallon de la Ribereta. Pendant que nous grimpons, le jour illumine les sommets peu à peu...
Ibon de Plan sur fond de punta Suelsa
Petit matin sur la Suelsa
Panorama sur la Suelsa, Batoua, Lustou
Nous remontons le vallon de la Ribereta en ski jusqu'au pied de la face nord du pic d'Espouy...
Laurent dans le vallon de la Ribereta, face au pic d'Espouy et sa diagonale nord
...puis équipement et encordement...
Laurent et Cyril prêts pour le départ de l'ascension
...et nous voilà partis sur cette pente que nous remontons tranquillement...
Cyril attaque la diagonale
...assurant des relais bétons sur les rochers pratiques de la rive droite (pitons et friends y trouvent logement facilement) ou en protégeant avec des pieux à neige de fabrication artisanale de la maison Renailler et Cie. On trouve juste un bref passage en glace. Cyril trace la route pendant qu'avec Laurent on fait crépiter nos appareils...
Photos...
Laurent dans la diagonale
Laurent à un relais...
Cyril en tête de cordée...
Laurent...
Plus on monte, plus c'est beau...
Cyril en pleine pente avec ses pieux à neige...
Inclinaison moyenne et homogène à 45/50° tout le long, sauf pour la dernière longueur que négocie Laurent - un court passage (7-8m) à 60°. Puis traversée sur des vires qui permettent de prendre pied dans la brèche de sortie, dominée par le ressaut impressionnant du pic de las Coronas.
Laurent passe devant pour sortir de la diagonale
Cyril est derrière maintenant
Cyril dans le passage à 60°
Je sors rejoindre Laurent, puis c'est au tour de Cyril...
Laurent assure au relais...
Derniers mètres pour Cyril
A la sortie...
C'est fini!
Quelques minutes de grimpe dans des rochers faciles suffisent pour rejoindre la proche cime du pic d'Espouy.
Laurent au sommet du pic d'Espouy
Cyril face au Cotiella
Pause au sommet
Vue sur le maître des lieux, le Cotiella
Nous y trouvons la croix érigée au sommet à la mémoire de Raymond d'Espouy (1892-1955).
Le célèbre pyrénéiste, avant de disparaître dans une avalanche dans le vallon de la Frêche au cours d'une hivernale en ski à l'Aneto, avait créé les Amitiés montagnardes, grâces auxquelles il entretenait de nombreuses et amicales relations avec les montagnards espagnols, notamment dans sa propriété de la tour de Mayrègne en vallée d'Oueil.
Raymond d'Espouy aux côtés de Julián Delgado Úbeda lors d'un rassemblement
franco-espagnol
Les dernières années avant sa disparition, il s'était épris du massif du Cotiella, comme autrefois du Posets, et excursionna souvent vers ses sommets, en compagnie de Pierre Billon (1917-2002).
Ce dernier le photographia d'ailleurs en 1954 au sommet du futur pic d'Espouy, cliché devenu célèbre. Ce fut la dernière grande course de Raymond d'Espouy.
Ce sont les catalans qui demandèrent à la Fédération Espagnole de Montagne (FEM) de baptiser le pic à son nom en 1956. Le baptême eut lieu le 26 juin 1958.
Ce jour là, une imposante caravane (40 français, 150 espagnols) se retrouvait au sommet : parmi eux, Julián Delgado Úbeda, Henri Favre, Pierre Billon, Suzanne Bacarisse, Félix Méndez Torres,...
Carte de visite de Felix Méndez Torres, grand ami de Raymond d'Espouy et président de la FEM
...Josep Maria Colomer i Torrent, Félix Moreno, Eduard Calvo, Chantal, Bénédicte et Philippe d’Espouy, Francisco Ramón Abella, José Ricardo Abad Botella, Rafael Montaner Aznar, Miguel Lacoma Mairal, Jaime Fabrés i Amorós, Jean-Victor Parant, le père Béarn, des lourdais… Au sommet, une croix et une plaque en bronze offertes par la FEM étaient scellées, sur la plaque figure :
Pic Cotiella
Pointe RAYMOND-D’ESPOUY
Pyrénéiste - Topographe
28 Oct.1892 - 20 Fév.1955
F.F.M. C.A.F.
Sur la croix :
A
R. D'ESPOUY
1892-1955
F.E.M.
La mémoire de Raymond d'Espouy sera régulièrement honorée sur ce sommet, en juillet 1974 par les Montañeros de Aragon, ou en encore le 22 juin 1980, lors de la commémoration des 25 ans de sa disparition : 102 montagnards espagnols et français s'y retrouvent, Pierre Billon y célèbre la messe, Maurice-José Jeannel, Pierre Dencausse, Jean-Victor Parant, Philippe d’Espouy, Bernard Clos, Jean Ségalas, Bernard Escaut, le père Escartín, Joaquín Torres Borruel, Félix Cruchaga Baños, des prêtres de Garaison, Dominique Tribot-Laspierres, Bernard Glass (PNPO)… avec différentes caravanes font parti des ascensionnistes ce jour là.
La plaquette éditée pour la commémoration des 25 ans de la disparition de Raymond d'Espouy, avec la photographie de Pierre Billon prise en 1954 au sommet du pic d'Espouy face au Cotiella
Sommet du pic d'Espouy, lors des célébrations de 1980
Enfin, l'histoire alpine du pic d'Espouy est courte et peu connue : après l'ascension de Billon et d'Espouy (1ère connue) en 1954, le premier parcours de la diagonale Nord était réalisé le 18 juillet 1955 par J. Surinyach, Hermenegildo Carreté i Bisbal et Alberto Font.
Le 10 octobre 1956, André Armengaud s'attribuait la face Nord. Et probablement ce même jour, il avait également réalisé le parcours de l'arête ouest (qu'il indiquera par erreur comme étant l'arête Sud dans son guide Posets-Maladeta, édition française de 1967, itinéraire 13).
En 1959, le pic d'Espouy recevait sa première visite hivernale, vaincu le 11 janvier depuis Armeña par José Maria Figuerola Ferré, José Lopez Pintado et Miguel Lacoma Mairal. Ils notifiaient alors leur ascension sur le registre déposé au sommet par le Centre Excursionniste de Catalogne (CEC).
Ensuite, les frères Jean et Pierre Ravier allaient entrer en scène dans le massif : le 26 août 1980, avec Bernard Chaussade et Xavier de Montsabert, ils réussissaient le parcours de l'arête Sud par la brèche de las Brujas. Puis le 5 octobre 1986, ils s'adjugeaient en compagnie d'André Etchelecou, l'éperon Est, voie directe et élégante depuis le cirque d’Armeña. Le 23 mai 1994, de retour dans le massif, les frères Ravier remontaient intégralement l'arête Ouest, qui se situe à l'opposé de l'éperon Est remonté en 1986. Au sommet, ils trouvaient la neige... Voilà pour la petite histoire de ce sommet...
Nous ne sommes pas mécontent de notre ascension, la croix est toujours à son emplacement, quant à la plaque elle doit être sous la neige.
Pendant le repas, tout en profitant du panorama délivré par ce sommet sous un beau ciel dans lequel trône le Cotiella, se pose la question de la d escente : finalement, nous décidons de suivre la crête NO...
Panorama sur la crête de la punta de los Neis depuis le col de la Pala del Puerto
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