Samedi 30 - Dimanche 31 août 2014
Voyage au sommet du mont Perdu... depuis les Gabiétou par les 3000 du cirque de Gavarnie
Samedi 30 août 2014
18 heures, col des Tentes, départ pour le glacier des Gabiétou dans la soupe, vent et visibilité réduite à quelques dizaines de mètres.
Brouillard sur le chemin de Boucharo
Port de Boucharo, pas mieux, je continue par le sentier du col des Sarradets une dizaine de minutes avant de bifurquer à droite toute. Au bruit de la cascade jaillissant du glacier, j'arrive à trouver la direction de ce dernier. Quelques cairns fantomatiques autour de la cascade permettent de surmonter au mieux cette dernière (quelques pas humides à aborder avec précaution surtout si on est chargé comme c'est mon cas). Arrivé au glacier, je trouve sur un rocher un repère du PNP datant de 2007.
Je remonte la partie basse du glacier et vais m'installer en bordure de la cuvette glaciaire. Pendant ce temps, éclaircie locale, je suis entre deux couches de nuages. 19h30, bivouac installé, j'ai un peu de temps et vais me balader sur le glacier. En tirant vers la rive gauche, je me rend compte que la rampe neigeuse habituelle permettant de franchir la barre rocheuse dominant le glacier est complètement déneigée, et forme un couloir suintant et sombre, obstrué par un énorme bouchon de neige sous lequel il faudrait passer. L'idée ne me dis trop rien et je monte jusqu'à la rimaye au fond du glacier histoire de voir si il y a une autre solution. Dans la paroi, oui, mais partout, la rimaye est infranchissable, large et profonde d'une vingtaine de mètre en moyenne, formant un gouffre sombre tapissé de glace luisante. La suivant par le haut, je reviens sur la rive droite, et fini par trouver un passage qui me permettra demain de passer et d'attraper le rocher pour remonter une cheminée praticable à vue. J'aménage le passage en taillant quelques marches en prévision d'un passage nocturne tôt demain.
Partie inférieur en glace vive du glacier, au fond le Vignemale
Rimaye du glacier des Gabiétou et rive gauche
Vue sur la cuvette du glacier depuis la rimaye
Retour au bivouac, je n'installe pas la tente, repas, et nuit sur les cailloutis qui ont vite raison du matelas auto-gonflant. Du coup, je ne dors pas très bien et dans la nuit, je me décide à retarder mon réveil pour passer la rimaye de jour. Oublié le levé de soleil au Gabiétou.
8h30, après contemplation des lueurs matinales sur le Vignemale...
...me voilà à l'œuvre. Je retrouve mes petites marques d'hier, me coince dans la rimaye avec le gouffre sous les fesses, ancre piolet en main gauche et crampon gauche dans le mur de neige dure, réussit à poser le pied droit sur une petite terrasse suffisante pour accueillir l'avant du crampon, saisit une prise en béton armé de la main droite... et entame avec précaution la bascule de tout mon poids sur le pied droit. Pied et main gauche transitent lentement au dessus de la rimaye quand soudain, pan! le crampon droit explose littéralement. Je manque perdre l'équilibre, et instinctivement, tenant tout mon poids sur la prise de la main droite, je tire comme un âne sur le bras droit et parvient à poser le pied gauche sur une prise et à attraper une autre prise en main gauche, lâchant le piolet que la dragonne me conserve au poignet. Le crampon droit s'est mis en travers, je secoue la jambe et il gicle de la chaussure, allant se perdre dans la rimaye en rebondissant plusieurs fois. Tout haletant et suant d'un coup, je dégage sur une petite terrasse 2 mètres plus haut, m'y pose et en prenant appui sur cette dernière, c'est cette fois-ci le crampon gauche qui pète. Je réalise surtout que c'est moi qui ai failli finir au fond de la rimaye et reste là un bon moment pour me remettre de mes émotions. La journée commence bien me dis-je...
...me voilà à l'œuvre. Je retrouve mes petites marques d'hier, me coince dans la rimaye avec le gouffre sous les fesses, ancre piolet en main gauche et crampon gauche dans le mur de neige dure, réussit à poser le pied droit sur une petite terrasse suffisante pour accueillir l'avant du crampon, saisit une prise en béton armé de la main droite... et entame avec précaution la bascule de tout mon poids sur le pied droit. Pied et main gauche transitent lentement au dessus de la rimaye quand soudain, pan! le crampon droit explose littéralement. Je manque perdre l'équilibre, et instinctivement, tenant tout mon poids sur la prise de la main droite, je tire comme un âne sur le bras droit et parvient à poser le pied gauche sur une prise et à attraper une autre prise en main gauche, lâchant le piolet que la dragonne me conserve au poignet. Le crampon droit s'est mis en travers, je secoue la jambe et il gicle de la chaussure, allant se perdre dans la rimaye en rebondissant plusieurs fois. Tout haletant et suant d'un coup, je dégage sur une petite terrasse 2 mètres plus haut, m'y pose et en prenant appui sur cette dernière, c'est cette fois-ci le crampon gauche qui pète. Je réalise surtout que c'est moi qui ai failli finir au fond de la rimaye et reste là un bon moment pour me remettre de mes émotions. La journée commence bien me dis-je...
Les crampons utilisés sont des Simond, modèle Caiman. En fait, c'est la seule partie constitué de plastique (bleu, bien visible sur la photo), enserrant l'arrière de la chaussure, qui a lâchée sur le crampon qu'il me reste (c'est le même mécanisme qui a opéré pour celui gisant désormais au fond de la rimaye).
Photo pour ceux qui possèdent cet équipement (je vais signaler l'incident au fabriquant), voyez donc le résultat :
On voit bien à droite la rupture du plastique bleu... et la bande de serrage arrière qui se balade...
Bon, je retire mon désormais unique crampon, le raccroche au sac et me décide à repartir vers le haut, remontant avec précaution par coincements successifs une raide cheminée pourrie d'une douzaine de mètres qui demande de vérifier chaque prise et de faire un peu de nettoyage. J'arrive à la sortie pour constater que je ne pourrais pas passer : le passage est fermé par un goulet vertical de 30 cm de large, dans lequel mon sac ne pourra pas passer, et je n'ai pas de corde pour le hisser. Bon, je redescend sur la terrasse de base, fait quelques mètres à gauche, et remonte une autre cheminée du même acabit, plus longue, mais qui va en s'élargissant et me permet (ouf!) de surmonter la barre rocheuse. Au sommet, je trouve même... un spit! Aller, il ne reste plus qu'à rejoindre le col des Gabiétou par la vire suspendue qui domine le glacier. Je débarque enfin au col, y laisse le sac, et file au Gabiétou oriental (9h55), y reste juste le temps de faire quelques photos...
Gabiétou occidental depuis l'oriental
...avant de rejoindre le sommet occidental (10h05) pour une petite pause contemplative.
Gabiétou oriental depuis l'occidental, avec montagnards au sommet, vautour fauve en approche, au fond massif Néouvielle-pic Long
Vue sur Otal, Tendeñera...
En passant à flanc sous le sommet oriental (présence massive de génépi)...
Grande cascade du cirque
Refuge et col des Sarradets, ancienne route de Boucharo
Marboré depuis la Tour
Puis direction le col de la Cascade par la crête (16h10), descente à gauche sous les remparts de l'Epaule...
Epaule du Marboré depuis les alentours du col de la Cascade
...et poursuite par un vallon enneigé dans lequel je refait le plein d'eau. Lourdement chargé, l'escalade directe du ressaut défendant l'accès au plateau sommital de l'Epaule ne me dis rien aujourd'hui, je poursuis sous la barre jusqu'à son point de faiblesse (passage de la voie normale du Marboré). De là, je reviens sur la gauche par un vallon enneigé puis une large croupe vers l'Epaule, encore bien loin, et au sommet de laquelle un nuage m'enveloppe. Je n'y reste qu'un instant, et poursuit vers le proche pic occidental de la Cascade, pris aussi dans le nuage. Le temps d'arriver au pic Brulle (18h), un coup de vent bienvenu est venu chasser le nuage et je retrouve le soleil.
Epaule du Marboré et pic occidental de la Cascade depuis le pic Brulle
Courte pause et poursuite au pic oriental de la Cascade, escalade du petit ressaut de la face sud, quelques instants au sommet (18h20), puis je dirige mes pas vers le Marboré sur lequel je parviens à 18h45.
Au moment ou j'arrive en vue du lac Glacé, un superbe et immense gypaète, poitrail enflammé par le soleil déclinant, passe tout droit en surgissant face à moi par dessus le col du Cylindre.
Gabiétou occidental depuis l'oriental
...avant de rejoindre le sommet occidental (10h05) pour une petite pause contemplative.
Gabiétou oriental depuis l'occidental, avec montagnards au sommet, vautour fauve en approche, au fond massif Néouvielle-pic Long
Vue sur Otal, Tendeñera...
En passant à flanc sous le sommet oriental (présence massive de génépi)...
Sur les flancs du Gabiétou oriental
...retour au col (10h40).
Le temps de recharger le sac et je remonte ensuite au Taillon par l'arête ouest...
Les Gabiétou depuis l'arête ouest du Taillon
et les éboulis sommitaux (11h35)...
Fin de l'ascension du Taillon
...y reste quelques instants...
Sommet du Taillon
Mer de nuage depuis le Taillon
Doigt, pic Bazillac et sommets de Gavarnie depuis le Taillon
...et rejoint le Doigt (vieux souvenirs)...
Près de la plaque à la mémoire de Johannes Schmidt
...puis la brèche de Roland (foule du dimanche, 12h10).
...retour au col (10h40).
Le temps de recharger le sac et je remonte ensuite au Taillon par l'arête ouest...
Les Gabiétou depuis l'arête ouest du Taillon
et les éboulis sommitaux (11h35)...
Fin de l'ascension du Taillon
...y reste quelques instants...
Sommet du Taillon
Mer de nuage depuis le Taillon
Doigt, pic Bazillac et sommets de Gavarnie depuis le Taillon
...et rejoint le Doigt (vieux souvenirs)...
Près de la plaque à la mémoire de Johannes Schmidt
...puis la brèche de Roland (foule du dimanche, 12h10).
Là, je cogite un bon moment en mangeant, le retardement du réveil, le temps perdu pour passer la rimaye, le Marboré est encore bien loin et que dire du mont Perdu.
Néanmoins, même si déjà des nuages sont partis à l'assaut de la plus belle des montagnes calcaires, à 13h10, je me décide à repartir.
Eperon Fourastié, col et pics d'Astazou
Direction le Pas de Isards et sa chaîne, le col, puis le Casque du Marboré, en laissant le sac au niveau de la cuvette sous la crête qui l'unit avec la Tour. 14h15, sommet, j'y reste quelques minutes...
Brèche de Roland depuis le Casque
Au Casque du Marboré
Marboré depuis le Casque
...retour au sac, puis voyant le couloir de la voie normale de la Tour encore enneigé (je n'ai plus qu'un seul crampon!), je passe par la cravate de la face sud...
Sentier de la cravate de la Tour et Casque
...surmonte à gauche la petite barre rocheuse qui lui fait suite et atteint le sommet de la Tour par des pentes d'éboulis (15h20). Bonne séance photo, la Tour propose à mes yeux le plus beau point de vue qui soit sur les lignes fuyantes du cirque de Gavarnie.
Casque et Taillon depuis la TourEperon Fourastié, col et pics d'Astazou
Direction le Pas de Isards et sa chaîne, le col, puis le Casque du Marboré, en laissant le sac au niveau de la cuvette sous la crête qui l'unit avec la Tour. 14h15, sommet, j'y reste quelques minutes...
Brèche de Roland depuis le Casque
Au Casque du Marboré
Marboré depuis le Casque
...retour au sac, puis voyant le couloir de la voie normale de la Tour encore enneigé (je n'ai plus qu'un seul crampon!), je passe par la cravate de la face sud...
Sentier de la cravate de la Tour et Casque
...surmonte à gauche la petite barre rocheuse qui lui fait suite et atteint le sommet de la Tour par des pentes d'éboulis (15h20). Bonne séance photo, la Tour propose à mes yeux le plus beau point de vue qui soit sur les lignes fuyantes du cirque de Gavarnie.
Grande cascade du cirque
Refuge et col des Sarradets, ancienne route de Boucharo
Marboré depuis la Tour
Puis direction le col de la Cascade par la crête (16h10), descente à gauche sous les remparts de l'Epaule...
Epaule du Marboré depuis les alentours du col de la Cascade
...et poursuite par un vallon enneigé dans lequel je refait le plein d'eau. Lourdement chargé, l'escalade directe du ressaut défendant l'accès au plateau sommital de l'Epaule ne me dis rien aujourd'hui, je poursuis sous la barre jusqu'à son point de faiblesse (passage de la voie normale du Marboré). De là, je reviens sur la gauche par un vallon enneigé puis une large croupe vers l'Epaule, encore bien loin, et au sommet de laquelle un nuage m'enveloppe. Je n'y reste qu'un instant, et poursuit vers le proche pic occidental de la Cascade, pris aussi dans le nuage. Le temps d'arriver au pic Brulle (18h), un coup de vent bienvenu est venu chasser le nuage et je retrouve le soleil.
Epaule du Marboré et pic occidental de la Cascade depuis le pic Brulle
Cylindre, mont Perdu dans le nuage, canyon d'Ordesa, d'Anisclo, Sestrales...
Gendarmes de l'arête des Druides sous le Marboré
Vue sur les faces nord des sommets du cirque depuis le Marboré
Cylindre du Marboré
Le mont Perdu émerge enfin des nuages qui l'ont assaillis toute l'après-midi, et à 19h10, direction le lac Glacé. Il me faut redescendre de 200 bon mètres, et au vu de l'heure et du retard pris ce matin, je décide de ne pas remonter vers le Cylindre par le couloir évident qui aboutit au pied des deux cheminées de la voie normale...
Au pied du couloir permettant de rejoindre le Cylindre
Si j'y monte, je n'aurais pas le temps d'arriver avant la nuit au mont Perdu, et ayant déjà dormi deux fois au sommet du Cylindre, mon idée principale est bien de dormir au sommet du mont Perdu (c'est le dernier bivouac russellien qu'il me manque, après le Vignemale et l'Aneto). Il me faut cependant remonter un peu avant de traverser à flanc du Cylindre...
Mont Perdu, voie des Echelles, Sestrales...
Vues sur le canyon d'Ordesa
Vue sur les faces nord des sommets du cirque depuis le Marboré
Vue sur la Munia
Cylindre du Marboré
Au pied du couloir permettant de rejoindre le Cylindre
Si j'y monte, je n'aurais pas le temps d'arriver avant la nuit au mont Perdu, et ayant déjà dormi deux fois au sommet du Cylindre, mon idée principale est bien de dormir au sommet du mont Perdu (c'est le dernier bivouac russellien qu'il me manque, après le Vignemale et l'Aneto). Il me faut cependant remonter un peu avant de traverser à flanc du Cylindre...
Mont Perdu, voie des Echelles, Sestrales...
Vues sur le canyon d'Ordesa
Au moment ou j'arrive en vue du lac Glacé, un superbe et immense gypaète, poitrail enflammé par le soleil déclinant, passe tout droit en surgissant face à moi par dessus le col du Cylindre.
20h, lac Glacé du mont Perdu...
Au lac Glacé du mont Perdu
...vision superbe du sommet reflétant sa cime enflammé dans les eaux du lac...
20h15, plein d'eau refait avec cachet pour la traiter (lors de mes 2 bivouacs au Cylindre, j'avais fait le plein final dans ce même lac, et le lendemain m'étais à chaque fois réveillé avec le ventre en charpie), direction le sommet, je fais des photos de la fin de journée avant la montée finale du célèbre crachoir...
Fin de journée en montant au mont Perdu
Silhouette cylindrique
Aujourd'hui, l'éboulis terminal est pénible. Arrivé au collet de sortie, une tente est installée, ce sont des français qui m'indiquent que des espagnols sont déjà installés au sommet. Je pose mon sac dans un enrochement de bivouac juste à côté, attrape la frontale et termine l'ascension des 30 derniers mètres pour atteindre le repère géodésique sommital à 21h20. A l'horizon, les toutes dernières lueurs finissent de s'éteindre dans le ciel envahit par la nuit étoilée. Et je ne suis pas mécontent de cette fin de journée qui se termine bien mieux qu'elle n'avait commencé. Une photo pour la forme...
3355 mètres
...retour au bivouac, il ne fait pas froid, je ne plante même pas la tente (l'art de trimballer du matériel pour rien), mange et ne demande pas mon reste pour sombrer dans le sommeil. Pour une fois, je dors bien en montagne.
Au lac Glacé du mont Perdu
...vision superbe du sommet reflétant sa cime enflammé dans les eaux du lac...
20h15, plein d'eau refait avec cachet pour la traiter (lors de mes 2 bivouacs au Cylindre, j'avais fait le plein final dans ce même lac, et le lendemain m'étais à chaque fois réveillé avec le ventre en charpie), direction le sommet, je fais des photos de la fin de journée avant la montée finale du célèbre crachoir...
Fin de journée en montant au mont Perdu
Silhouette cylindrique
Aujourd'hui, l'éboulis terminal est pénible. Arrivé au collet de sortie, une tente est installée, ce sont des français qui m'indiquent que des espagnols sont déjà installés au sommet. Je pose mon sac dans un enrochement de bivouac juste à côté, attrape la frontale et termine l'ascension des 30 derniers mètres pour atteindre le repère géodésique sommital à 21h20. A l'horizon, les toutes dernières lueurs finissent de s'éteindre dans le ciel envahit par la nuit étoilée. Et je ne suis pas mécontent de cette fin de journée qui se termine bien mieux qu'elle n'avait commencé. Une photo pour la forme...
3355 mètres
...retour au bivouac, il ne fait pas froid, je ne plante même pas la tente (l'art de trimballer du matériel pour rien), mange et ne demande pas mon reste pour sombrer dans le sommeil. Pour une fois, je dors bien en montagne.
5h45, réveil, petit déjeuner, et retour au sommet pour un levé de soleil dantesque.
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